Caractérisation et réduction des scintillements LED dans les applications d’éclairage

Par Steven Keeping

Avec la contribution de Electronic Products


Remplacer les lampes à incandescence traditionnelles par des LED efficaces et durables est une bonne idée. Mais comme pour toutes les bonnes idées, la mise en œuvre est souvent compliquée.

Même si les LED sont fournies avec le circuit d'attaque permettant de les connecter à une alimentation CA domestique existante, il existe un risque de scintillement en raison de l'ondulation de tension à la sortie de l'alimentation. Le scintillement intervient avec la plupart des éclairages, et certains consommateurs se plaignent que les effets entraînent des effets d'inconfort voire de malaise.

Les fabricants de LED et de luminaires veulent identifier la source du problème, car si l'éclairage à semi-conducteurs devient associé aux scintillements, même si ce n'est pas le cas, il sera difficile de convaincre les consommateurs de s'éloigner des lampes traditionnelles.

Cet article s'attache à la cause du scintillement, décrit pourquoi il s'agit d'un problème spécifique aux LED et explique comment les organismes de normalisation et d'ingénierie essaient de quantifier le phénomène pour des installations de test et des fabricants de LED, circuits d'attaque et luminaires. Cet article présente enfin des produits récents des principaux fournisseurs de puces silicium, annonçant offrir une nouvelle manière rentable d'implémenter un éclairage LED sans scintillement.

Les effets du scintillement

Selon des études, 1 personne sur 4000 est hautement susceptible aux cycles de lumière clignotante dans la plage de 3 à 70 Hz. Un scintillement aussi évident peut déclencher des malaises graves tels que des crises épileptiques. Un effet moins connu est que l'exposition à long terme à des scintillements à plus hautes fréquences (non intentionnelles) (dans la plage de 70 à 160 Hz) peut également provoquer des malaises, des migraines et une déficience visuelle.

Malheureusement, à moins de se trouver en lumière naturelle, une personne a de grandes chances d'être exposée à ces scintillement plus hautes fréquences, car toutes les sources lumineuses alimentées par secteur, qu'il s'agisse de lampes à incandescence, halogène, fluorescentes ou LED, sont sujettes aux scintillements. La source est la composante alternative de l'alimentation, et la fréquence de scintillement est typiquement égale à la fréquence secteur (généralement 50 ou 60 Hz) ou le double de la fréquence secteur.

Les tests montrent que les humains ont des difficultés à capter directement le scintillement lumineux à ces plus hautes fréquences, mais cela ne semble guère être important. Des scientifiques ont mené des recherches indiquant que la rétine humaine peut résoudre un scintillement lumineux de 100 à 150 Hz, même si le sujet n'en est pas conscient, et ont conclu que le cerveau pourrait réagir.

Les effets insidieux de ce soi-disant scintillement imperceptible dans la plage de 100 à 150 Hz ne sont pas juste une fonction de la fréquence. Des facteurs physiques et physiologiques jouent également un rôle important. Par exemple, une lumière vive est pire qu'une lumière diffuse, et la différence entre les parties lumineuses et les parties sombres du modèle d'éclairage sont importantes (une lumière devenant complètement sombre durant le temps « off » du cycle est pire qu'une lumière devenant seulement partiellement diffuse). Une lumière rouge et une lumière bleue et rouge en alternance peuvent s'avérer particulièrement problématiques, et la position de la source lumineuse sur la rétine est importante, dans la mesure où la lumière captée au centre est pire que celle captée en périphérie.

Des chercheurs affirment que la rétine peut capter un scintillement jusqu'à 200 Hz, mais les tests montrent qu'au-dessus de 160 Hz, les effets du scintillement sur la santé sont négligeables.¹

Définition du scintillement


Jusqu'à récemment, les ingénieurs spécialisés en éclairage n'étaient pas vraiment concernés par les effets du scintillement imperceptible. Toutefois, avec le durcissement des régulations en matière de santé et de sécurité, des recherches plus avancées et les plaintes croissantes des personnels exposés à un éclairage généralisé des bureaux par tubes fluorescents ont conduit à une réaction.

Mais sans une définition claire du scintillement, qui peut affirmer qu'une source lumineuse est meilleure qu'une autre ? L'organisme IESNA (Illuminating Engineering Society of North America) a relevé ce défi et a fourni une définition du « taux de scintillement » et de l'« indice de scintillement » dans la neuvième édition du guide d'éclairage IESNA Lighting Handbook. La Figure 1 montre comment les mesures sont définies.

Schéma de la trace de sortie lumineuse

Figure 1 : Schéma de la trace de sortie lumineuse utilisée pour définir le taux et l'indice de scintillement.

Le taux de scintillement est une mesure relative de la variation cyclique dans la sortie d'une source lumineuse (c'est-à-dire le taux de modulation). On parle aussi d'indice de modulation.

D'après la figure : taux de scintillement = 100 x (A – B)/(A + B)

L'indice de scintillement est une mesure relative fiable de la variation cyclique dans la sortie de plusieurs sources à une fréquence secteur donnée. Il prend en compte la forme d'onde de la sortie lumineuse ainsi que son amplitude, selon le manuel. L'indice de scintillement suppose des valeurs de 0 à 1,0, avec 0 pour sortie lumineuse fixe. Des valeurs plus élevées indiquent une possibilité accrue d'un scintillement lumineux perceptible, ainsi qu'un effet stroboscopique.

Toujours d'après la figure : indice de scintillement = zone 1/zone 1 + zone 2

Problèmes avec les LED

Les caractéristiques physiques des LED déterminent qu'elles doivent être alimentées de manière différente des autres sources lumineuses (voir l'article TechZone relatif à la compréhension des causes d'atténuation dans les LED haute luminosité).

Les LED, comme leur nom l'indique, constituent une forme de diode. En fonctionnement normal, une tension directe constante d'amplitude suffisante (typiquement avec les LED en série avec une résistance) pour que le dispositif fonctionne dans sa zone de conduction, est appliquée. Les tensions directes pour les dispositifs commerciaux haute luminosité sont typiquement dans la plage de 3 V à 4,5 V. La relation entre la tension directe (VF) et le courant direct (IF) est importante car le courant détermine le flux lumineux relatif (essentiellement la luminosité) de la LED.

Les fabricants recommandent une plage de fonctionnement étroite pour une LED, qui correspond typiquement à un compromis entre luminosité et rendement.

Les Figures 2a et 2b illustrent la tension par rapport au courant et le courant par rapport au flux lumineux relatif pour une LED XLamp ML-B de Cree. La variation de la tension directe affectera le courant direct et donc le flux lumineux.

Tension directe par rapport au courant direct, et courant direct par rapport aux flux lumineux relatif

Figures 2a et 2b : Tension directe par rapport au courant direct, et courant direct par rapport aux flux lumineux relatif pour une LED Cree XLamp ML-B.

L'alimentation d'une puce LED à partir d'une source CA exige un régulateur pour abaisser l'alimentation secteur 110 à 115 V ou 230 à 240 V, 50 ou 60 Hz utilisée dans la plupart des pays, pour les exigences de courant et de tension inférieures des LED. À noter que les luminaires utilisent typiquement six à huit puces LED par dispositif, ce qui fait que les besoins en alimentation pour chaque unité sont supérieurs à ceux d'une LED unique.

Une forme de base des circuits d'attaque LED comprend un redresseur à deux alternances (Figure 3) connecté à une chaîne de LED avec une résistance en série pour limiter le courant. Cette approche module les LED à deux fois la fréquence CA (c'est-à-dire 100 à 120 Hz). Vu que l'intensité lumineuse est proportionnelle au courant, la LED scintille à ce taux (Figure 4).

Circuit d'attaque DEL simple de redresseur à deux alternances

Figure 3 : Circuit d'attaque LED simple de redresseur à deux alternances.

Sortie des DEL dans la Figure 3

Figure 4 : Sortie des LED dans la Figure 3. Les lampes scintillent à deux fois la fréquence secteur.

Toutes les sources lumineuses qui dérivent leur alimentation depuis le secteur CA sont susceptibles de scintiller. Mais cela est particulièrement vrai pour les LED car l'indice de scintillement (ou la profondeur de modulation) est typiquement plus défavorable que celui des sources lumineuses traditionnelles.

Cela est dû au fait que les LED réagissent particulièrement vite aux variations du courant. À 120 Hz, la LED elle-même et son phosphore électroluminescent blanc disposent de beaucoup de temps pour complètement stopper la production de photons durant le temps « off » de la forme d'onde. Par contraste, les sources lumineuses traditionnelles, et plus particulièrement les types à incandescence et halogène, présentent une « inertie ». Cela signifie que même durant le temps « off » du cycle, elles peuvent continuer à émettre des photons.

Le Tableau 1 récapitule le taux et l'indice de scintillement de plusieurs sources lumineuses, y compris des LED commandées par des sources CA et CC.² (Les colonnes Min, Max et Moyenne répertorient l'intensité relative de chaque source.)

Comme mentionné précédemment, en plus de la fréquence, l'indice de scintillement a un effet significatif sur la manière dont les personnes perçoivent la lumière. Un indice de scintillement élevé tend à être plus perceptible et il est par conséquent plus préjudiciable.

  Max Min Moyenne Taux de scintillement Indice de scintillement
Incandescence 12,180 10,745 11,460 6,2594 0,0194
100 W MH 9,1472 3,2066 6,5147 48,088 0,1398
T12 magnétique 9,6281 4,6256 7,1565 35,096 0,0897
T5HO électronique 10,52 9,960 10,20 2,734 0,0036
LED à CC 43,4 41,0 42,2 2,84 0,0037
LED avec scintillement 15,996 0,0555 6,3026 99,309 0,4498

Tableau 1 : Récapitulatif du taux et de l'indice de scintillement pour sources lumineuses. Un indice de scintillement élevé est plus perceptible pour l'œil humain.

Circuits d'attaque LED améliorés

La plupart des circuits d'attaque LED contemporains sont un peu plus sophistiqués que l'exemple simple de la Figure 3, avec les alimentations à découpage haute fréquence représentant un choix populaire en raison de leur rendement. Le filtrage d'entrée et de sortie utilisé par les alimentations à découpage permet de considérablement réduire la composante alternative de l'alimentation secteur à la sortie, mais une certaine ondulation est inévitable. Certaines unités sont pires que d'autres, c'est pourquoi les ingénieurs doivent choisir leur circuit d'attaque LED avec soin.

Tandis que les alimentations LED à découpage permettent de réduire l'indice de scintillement en atténuant la composante alternative de leur sortie, la fréquence de scintillement, à deux fois la fréquence secteur, n'est pas affectée et reste dans la plage qui a été identifiée par les chercheurs comme un problème pour les humains.

L'agence américaine EPA (Environmental Protection Agency), très influente, a tenté de s'attaquer au problème en recommandant que la fréquence opérationnelle pour les LED soit élevée à 150 Hz. Les spécifications ENERGY STAR de l'organisation, à laquelle les fabricants doivent adhérer pour bénéficier de la certification ENERGY STAR et de ses avantages commerciaux, incluent une spécification concernant le scintillement.

En 2009, la spécification relative au scintillement a été modifiée afin de stipuler une fréquence de fonctionnement LED minimum de 150 Hz, et non plus de 120 Hz comme dans la version précédente de la spécification. Les fabricants de LED et de semi-conducteurs n'étaient pas partisans de ce changement, car la modification de leurs produits pour s'adapter à la nouvelle fréquence impliquaient des coûts élevés.

Dans une lettre adressée aux parties intéressées datant de mars 2010,³ l'EPA a cédé et fait marche arrière en redéfinissant la spécification sur 120 Hz, valeur toujours en vigueur actuellement.

Cela étant dit, de nombreux circuits d'attaque LED sur le marché se connectant directement à l'alimentation secteur annoncent produire une alimentation sans scintillement. Cirrus Logic, par exemple, a récemment lancé sa gamme de circuits d'attaque LED CS161x (CS1610-FSZ, CS1611-FSZ). Les puces conviennent à une utilisation avec des tensions de ligne de 100 à 120 VCA et de 220 à 240 VCA, et sont supposées présenter l'avantage de maintenir des performances sans scintillement même lors de leur utilisation avec des commutateurs de gradation hérités (qui causent souvent des complications pour les circuits d'attaque LED qui compromettent l'indice de scintillement).

CUI Inc. propose également un circuit d'attaque à courant constant, V-Infinity VLED15 (Figure 5), offrant des performances sans scintillement à pleine luminosité et lors de l'utilisation avec des commutateurs de gradation traditionnels. Ce module est disponible en deux versions, l'une pour les entrées 115 VCA et l'autre pour les entrées 230 VCA .

VLED15 de CUI Inc.

Figure 5 : Le VLED15 de CUI Inc. offre une alimentation LED sans scintillement même avec des commutateurs de gradation hérités.

Le BP5843A de ROHM Semiconductor constitue une option supplémentaire. Il s'agit d'un module SIP à 11 broches pouvant être utilisé pour alimenter plusieurs LED haute luminosité en série ou en parallèle à partir d'une alimentation de 113 à 170 VCA. Le module présente une faible ondulation de tension de sortie crête-à-crête contribuant à garantir une alimentation LED sans scintillement.

En résumé

Les ingénieurs spécialisés en éclairage concevant des luminaires LED peuvent viser de nombreux avantages pour leurs sources lumineuses, tels que le rendement, la longévité et la robustesse. Ils doivent cependant rester conscients des effets indésirables potentiels de leurs produits pouvant survenir auprès des consommateurs supportant mal les éclairages à semi-conducteurs.

Même si le scintillement est imperceptible, il peut néanmoins constituer un problème. Par exemple, des personnes travaillant dans des bureaux éclairés par tubes fluorescents à scintillement ont rapidement mis en avant un « syndrome des bâtiments malsains » pour justifier leur taux d'absentéisme plus élevé que la moyenne. Il n'existe aucune preuve directe de l'effet des scintillements sur leurs malaises, mais des recherches récentes suggèrent qu'il s'agit très certainement de l'une des causes.

En conséquence, la conception d'éclairage LED avec des scintillements réduits semble être une solution d'avenir. Optez pour des circuits d'attaque LED haute fréquence de bonne qualité, qui permettront de minimiser la composante alternative dans les ondulations de courant et de tension à la sortie, qui limiteront à leur tour la profondeur de modulation du scintillement des LED. Et même si des recherches avancées doivent venir confirmer la théorie, c'est une bonne idée de rechercher des circuits d'attaque LED convertissant la composante alternative en ondulation de sortie de 150 Hz ou plus, car les premières indications sont qu'à cette fréquence, tout scintillement a un effet négligeable sur la santé.

Références :
  1. A Review of the Literature on Light Flicker: Ergonomics, Biological Attributes, Potential Health Effects, and Methods in Which Some LED Lighting May Introduce Flicker, IEEE Standard P1789, février 2010.
  2. The Evaluation of Flicker in LED Luminaires, Michael Grather, Président, Luminaire Testing Laboratory, Inc.
  3. Open letter from Alex Baker, Lighting Program Manager, ENERGY STAR, 22 mars 2010.
 

Avertissement : les opinions, convictions et points de vue exprimés par les divers auteurs et/ou participants au forum sur ce site Web ne reflètent pas nécessairement ceux de DigiKey ni les politiques officielles de la société.

À propos de l'auteur

Image of Steven Keeping

Steven Keeping

Steven Keeping is a contributing author at DigiKey. He obtained an HNC in Applied Physics from Bournemouth University, U.K., and a BEng (Hons.) from Brighton University, U.K., before embarking on a seven-year career as an electronics manufacturing engineer with Eurotherm and BOC. For the last two decades, Steven has worked as a technology journalist, editor and publisher. He moved to Sydney in 2001 so he could road- and mountain-bike all year round, and work as editor of Australian Electronics Engineering. Steven became a freelance journalist in 2006 and his specialities include RF, LEDs and power management.

À propos de l'éditeur

Electronic Products

Le magazine Electronic Products et le site ElectronicProducts.com s'adressent aux ingénieurs et aux directeurs de l'ingénierie responsables de la conception de systèmes et d'équipements électroniques.