Les DEL à substrat silicium amélioré permettent de réduire les coûts élevés de l'éclairage à semi-conducteurs

Par Steven Keeping

Avec la contribution de Electronic Products

La technologie dominante dans les DEL haute luminosité est le nitrure de gallium (GaN) sur des substrats de saphir ou de carbure de silicium (SiC). Ces matériaux sont populaires étant donné qu'ils génèrent des DEL lumineuses, efficaces et qui durent longtemps. Cependant, les puces sont difficiles à fabriquer et à intégrer dans des dispositifs utilisables, ce qui augmente le coût des produits finaux les utilisant comme blocs d'éclairage DEL. Même si les prix ont chuté ces dernières années, l'éclairage DEL reste considérablement plus cher que les solutions alternatives traditionnelles à l'achat. Les dépenses initiales sont mentionnées comme étant un facteur majeur au ralentissement de l'acceptation de l'éclairage à semi-conducteurs (SSL).

Un groupe pionnier de fabricants a déployé des efforts considérables pour réduire les coûts des DEL haute puissance en remplaçant le saphir ou le substrat de carbure de silicium par du silicium (Si), le matériau utilisé habituellement pour fabriquer la plupart des puces électroniques (les « circuits intégrés »). L'avantage clé est le très faible coût de l'approvisionnement en plaquettes et l'opportunité d'utiliser des équipements de fabrication de plaquettes de 8 po dépréciées pour la fabrication de DEL. Lorsqu'ils sont combinés, ces concepts permettent de réduire considérablement le prix des DEL et de surmonter les objections des clients.

Initialement, des défis techniques ont limité les performances des DEL GaN-sur-Si, les rendant peu attrayantes pour l'éclairage grand public. Désormais, certains fabricants, et plus particulièrement Toshiba, présentent une nouvelle génération de ces DEL avec des performances infiniment améliorées à un prix très compétitif, faisant de celles-ci une solution alternative viable pour remplacer les dispositifs conventionnels dans de nombreuses applications.

Cet article traite du développement des DEL à substrat de silicium et décrit la dernière génération de dispositifs commerciaux.

Réduire les coûts des DEL

Même si elles ont nécessité plusieurs années de développement et des millions de dollars de financement en R&D, les DEL modernes constituent une solution alternative économique aux sources de lumière traditionnelles telles que les ampoules incandescentes, les tubes fluorescents et les lampes halogènes pour l'éclairage grand public lorsque des facteurs tels que le prix d'achat initial, la consommation d'énergie et la durée de vie sont pris en compte pour déterminer le « coût de possession ».

Un récent rapport1 rédigé par les analystes de McKinsey & Company conclut qu'en 2016 (en fonction de la rapidité de la chute du prix des DEL), le retour sur investissement d'un éclairage DEL (en raison des coûts de fonctionnement plus faibles et de la durée de vie plus longue) contrebalancera les prix d'achat initiaux plus élevés par rapport à une lampe fluorescente compacte (CFL) au bout de 1,7 à 3,9 ans. En 2011, le même calcul donnait un chiffre de 14 ans environ. (Figure 1)

Image de la durée du retour sur investissement d'une ampoule DEL par rapport à une ampoule CFL

Figure 1 : Durée de retour sur investissement d'une ampoule DEL par rapport à une ampoule CFL dans le segment résidentiel (la ligne sombre représente le cas de base et la ligne plus claire représente une érosion de prix plus rapide des DEL) (avec l'autorisation de McKinsey & Company).

Malheureusement, le même rapport conclut que, malgré une part de marché des DEL dans les applications d'éclairage atteignant environ 45 % en 2015, « le prix majoré des produits d'éclairage DEL reste élevé, et le prix d'achat initial représente une barrière considérable pour les décideurs lorsqu'ils envisagent un investissement initial dans des applications d'éclairage général ».

Cette réticence n'a probablement rien d'étonnant si nous considérons qu'une lampe DEL de remplacement comme la lampe DEL PAR38 équivalant à 100 W (modèle à incandescence) de Philips se vend au détail à 22 USD, contre 12 USD pour une lampe CFL T2 Twister équivalant à 100 W de la même entreprise et 6 USD pour une lampe halogène EcoSmart équivalant à 100 W.

Les puces DEL elles-mêmes constituent un élément clé dans le coût des ampoules DEL. Généralement, chaque ampoule DEL comprend une matrice de six, huit ou dix puces DEL, chacune fabriquée à partir de matériaux d'origine selon un processus de fabrication de plaquettes complexe, avant de passer par un processus de conditionnement onéreux avec une opération d'assemblage en trois ou quatre étapes. Le remplacement des matériaux et des coûts de fabrication par des solutions alternatives moins coûteuses devrait réduire considérablement le prix d'achat initial des DEL et encourager ainsi une adoption plus rapide.

L'alternative silicium

La révolution électronique a été bâtie sur le silicium ; un semi-conducteur abondant, stable et bon marché facile à créer dans le quartz, à trancher et à soumettre à des processus CMOS pour transformer chaque plaquette en des milliers de circuits intégrés. Par ailleurs, un énorme investissement a été réalisé sur des sites de fabrication pour produire en masse de telles puces, ce qui a permis de réduire les coûts par unité à quelques centimes.

Récemment, des fabricants de puces ont adopté un processus de fabrication de plaquettes plus efficace qui utilise des plaquettes de 300 mm (12 po) comme matière première, à la place des plaquettes plus anciennes de 200 mm (8 po). En conséquence, il existe des excès de capacité de plaquettes de 8 po dans le monde. Certains suggèrent de les utiliser dans la fabrication des DEL, pour réduire considérablement le prix des produits finaux.

La majorité des DEL contemporaines sont fabriquées à partir d'une combinaison de GaN, qui présente une barrière de potentiel appropriée pour émettre des photons dans la partie visible du spectre, sur un substrat de saphir. Les couches minces de GaN sont créées selon un processus appelé épitaxie, qui renforce les régions actives des DEL en déposant des couches successives sur le substrat. L'un des inconvénients est le décalage entre l'espacement de la maille de quartz (la distance de l'unité entre des atomes individuels dans la structure du quartz) de GaN et du substrat de saphir, qui résulte en des imperfections microscopiques dans la région active. Ces imperfections, également appelées dislocations de mise en place, compromettent la luminosité de la DEL et sa durée de vie.

Le carbure de silicium présente une structure de quartz qui est plus proche de celle du GaN que le saphir, ce qui réduit la densité d'imperfections et améliore l'efficacité et la longévité d'un ou parfois deux ordres de grandeur. (Consultez l'article TechZone relatif aux progrès dans les matériaux et la fabrication améliorant le rendement des DEL.)

Le saphir et le carbure de silicium sont non seulement chers à produire, mais également difficiles à fabriquer de manière fiable sur des plaquettes avec un diamètre supérieur à 100 mm (4 po). En plus d'être plus économiques et faciles à manipuler, les plaquettes de silicium de 8 po nécessitent un traitement à peine plus long que celui des plaquettes de 4 po. Le résultat final est que les usines peuvent quadrupler la production, car la superficie d'une plaquette de 8 po est quatre fois supérieure à celle d'une plaquette de 4 po (Figure 2), ce qui permet en même temps de réduire les coûts de matériaux et du traitement.

Image de comparaison de plaquettes de 2, 4, 6 et 8 po

Figure 2 : Comparaison des plaquettes de 2, 4, 6 et 8 po.

Cependant, l'adoption du silicium en tant que substrat de DEL présente des défis techniques redoutables. Le plus important est le fait que la structure du quartz du silicium est moins adaptée avec le GaN qu'avec le saphir. Pire encore, le silicium présente un coefficient d'expansion thermique très différent de celui du GaN. Ces deux facteurs entraînent la formation de contraintes de traction importantes dans les plaquettes durant la fabrication, résultant en des micro-craquelures à mesure que la plaquette refroidit. Les DEL craquelées ne fonctionnent pas correctement ou pas du tout. Pire encore, le silicium est un excellent absorbeur de photons qui devraient s'échapper et contribuer à la luminosité de la DEL. Ainsi, l'extraction de lumière des premières DEL GaN-sur-Si était de l'ordre d'un quart à un tiers de celle obtenue avec des dispositifs similaires au saphir (consultez l'article TechZone « Les substrats silicium permettront-ils de faire de l'éclairage DEL des produits grand public ? »).

Quelques entreprises pionnières ont persévéré avec leurs programmes de développement et si les DEL GaN-sur-Si n'ont pas la luminosité, le rendement et la durée de vie des DEL GaN-sur-saphir ou sur-SiC, les dispositifs actuellement dans les laboratoires ne connaissent pas les faibles performances des anciens dispositifs et peuvent être fabriqués à une fraction du coût de fabrication des DEL conventionnelles.

Silicium de deuxième génération

Avec l'amélioration constante des DEL traditionnelles (réduisant en même temps le nombre de DEL requises pour obtenir le même résultat que des ampoules incandescentes ou fluorescentes uniques), un nouveau marché pour les DEL milieu de gamme est né. Les puces milieu de gamme ne peuvent pas égaler les performances des dispositifs de pointe actuels, mais offrent des performances raisonnables (par exemple, une luminosité et une longévité équivalentes à celle d'une puce de pointe d'il y a deux ou trois ans) à un prix économique (consultez l'article TechZone relatif aux DEL moyenne puissance, une alternative plus économique pour les applications d'éclairage).

Le développement du marché de milieu de gamme a créé des opportunités pour les puces GaN-sur-Si. Les performances des DEL sur substrat de silicium actuelles peuvent facilement correspondre à celles des DEL milieu de gamme GaN-sur-saphir ou sur-SiC, tout en cassant le prix de ces dernières.

Toshiba (qui a initialement collaboré avec Bridgelux, avant d'acquérir la part de marché de son partenaire) est l'un des leaders sur le marché en termes de distribution de DEL GaN-sur-Si.

Toshiba est évasive, de manière compréhensible, sur la manière dont elle a résolu les difficultés techniques du décalage thermique et de la maille entre le GaN et le silicium et a fait peu déclarations publiques. Cependant, avant d'être rachetée, la société Bridgelux a révélé que le problème d'effort de traction avait été résolu en utilisant une couche tampon propriétaire (entre le GaN et le silicium).

D'autres informations sur les recherches de Toshiba sont disponibles dans des documents scientifiques. Un exemple2 publié en février 2006 décrit de quelle manière les chercheurs de Toshiba ont éliminé la génération de craquelures qui gênaient généralement l'épitaxie GaN sur le silicium en utilisant du carbure de silicium cubique comme couche intermédiaire. Le carbure de silicium cubique présente une constante de maille environ à mi-hauteur entre le GaN et le silicium, ce qui permet de relâcher les tensions pouvant se produire et s'accumuler et provoquer des craquelures entre des couches soutenues de GaN et de silicium.

Les chercheurs ont découvert qu'une couche de 1 µm de carbure de silicium sur le dessus d'une plaquette de silicium de 8 po traditionnelle était suffisante pour éliminer les craquelures dans la couche GaN active. Même s'il est légèrement plus onéreux que l'application de GaN sur du silicium nu, le procédé est bien moins cher que la fabrication de plaquettes en saphir ou en carbure de silicium étant donné qu'il est encore basé sur des processus de fabrication silicium, peu coûteux.

Toshiba affirme également que son processus GaN-sur-Si se prête à la production en quantité de puces à une DEL à « émission en volume » directement à partir de la plaquette sans forcément passer par le processus d'assemblage de DEL habituel (Figure 3). Les avantages de cette technique se traduisent par des DEL simples et plus économiques pouvant concurrencer les matrices CoB (Chip-on-Board) de plus en plus appréciées, des produits qui comprennent plusieurs DEL conventionnelles préassemblées dans une seule unité (consultez l'article TechZone relatif à l'essor des modules DEL CoB).

Image du processus GaN-sur-Si de Toshiba

Figure 3 : Le processus GaN-sur-Si de Toshiba permet de découper des DEL à émission en volume encapsulées directement depuis une plaquette sans passer par un processus de conditionnement traditionnel3 (avec l'autorisation de Toshiba).

Produits disponibles

Toshiba a lancé une première gamme de produits GaN-sur-Si vers la fin 2012. La DEL TL1F1 1 W fournit 112 lm (rendement de 112 lm/W, à une tension de 2,9 V et un courant de 350 mA) pour un dispositif blanc froid (5000 K).

Dix mois plus tard, l'entreprise a annoncé une gamme révisée (la gamme TL1L3), le dernier produit commercial disponible en volume, qui fournit 135 lm (135 lm/W, 2,85 V, 350 mA). Puis, début 2015, Toshiba a lancé des volumes d'échantillons de la gamme TL1L4 qui, selon l'entreprise, permettrait une augmentation de performances de 60 % par rapport à la génération précédente de dispositifs GaN-sur-Si. Le haut de la gamme comprend un produit blanc froid (5000 K et indice de rendu de couleurs IRC de 70) 1 W qui fournit 160 lm (160 lm/W, 2,8 V, 350 mA). D'autres variantes sont disponibles dans la plage de températures de 2700 à 6500 K. Les puces sont fournies dans un boîtier de 3,5 mm x 3,5 mm (Figure 4).

Image de la gamme TL1L4 de DEL GaN-sur-Si de Toshiba

Figure 4 : La gamme TL1L4 de DEL GaN-sur-Si promet 160 lm dans un boîtier de 3,5 x 3,5 mm.

Les performances de la gamme TL1L4 correspondent à celles des produits conventionnels de pointe pour la production en volume, tels que les produits XLamp XM-L2 de Cree (155 lm/W, 2,85 V, 700 mA) et OSLON Square d'OSRAM (163 lm/W, 3,05 V, 700 mA). En réalité, les produits de Toshiba offrent de meilleures performances que les dispositifs de milieu de gamme compétitifs comme les produits Xlamp MX-3S de Cree (85 lm/W, 10,7 V, 115 mA) et Luxeon 3535L de Philips Lumileds (121 lm/W, 3,05 V, 100 mA).

Pour une meilleure luminosité (au détriment du rendement), les produits TL1L4 peuvent fonctionner avec un courant direct de 1 A ou même 1,5 A tant que la température de jonction de la puce est maintenue en dessous de 150°C. Toshiba explique que, grâce à son niveau de performances, la gamme TL1L4 convient aux applications d'éclairage grand public telles que les plafonniers, les réverbères et les réflecteurs.

Technologie complémentaire

Actuellement, l'éclairage consomme environ 19 % de l'énergie mondiale. Il est estimé qu'une adoption en masse des DEL réduirait ce chiffre de trois quarts grâce à leur rendement beaucoup plus important. Les prix devraient continuer à baisser naturellement, et la disponibilité de DEL GaN-sur-Si hautes performances à faible coût, comme celles de Toshiba, promet d'accélérer le processus. Ces dernières permettront aux ingénieurs en éclairage d'offrir des solutions SSL qui surmonteront les objections des clients concernant les prix d'achat initiaux élevés.

Cette technologie alternative ne permettra vraisemblablement jamais de surpasser ne serait-ce que les dispositifs de pointe contemporains. Cependant, elle offre un vrai complément à une technologie existante qui, en mettant de côté les problèmes liés aux brevets, peut être adoptée par d'autres entreprises, entraînant de la concurrence, ce qui réduira davantage les prix et augmentera la part SSL sur le marché de l'éclairage.  

Pour plus d'informations sur les composants abordés dans cet article, cliquez sur les liens fournis pour accéder aux pages des produits sur le site Web de DigiKey.

Références :

  1. « Lighting the way: Perspectives on the Global Lighting Market – deuxième édition », McKinsey & Company, août 2012.
  2. « Suppression of crack generation in GaN epitaxy on Si using cubic SiC as intermediate layers », Komiyama, Jun et al, Applied Physics Letters Volume 88 numéro 9, février 2006.
  3. « Role of Substrate Choice on LED Packaging », Steve Lester, Toshiba America Electronic Components, 2014.
 

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À propos de l'auteur

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Steven Keeping

Steven Keeping is a contributing author at DigiKey. He obtained an HNC in Applied Physics from Bournemouth University, U.K., and a BEng (Hons.) from Brighton University, U.K., before embarking on a seven-year career as an electronics manufacturing engineer with Eurotherm and BOC. For the last two decades, Steven has worked as a technology journalist, editor and publisher. He moved to Sydney in 2001 so he could road- and mountain-bike all year round, and work as editor of Australian Electronics Engineering. Steven became a freelance journalist in 2006 and his specialities include RF, LEDs and power management.

À propos de l'éditeur

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