Commande de moteurs BLDC sans capteurs via la force contre-électromotrice

Par Steven Keeping

Avec la contribution de Electronic Products


Le moteur CC sans balais (BLDC) suscite un intérêt croissant car, comme son nom l'indique, il fait disparaître les balais sujets à l'usure utilisés dans les moteurs traditionnels, en les remplaçant par un contrôleur électronique qui améliore la fiabilité de l'unité. De plus, un moteur BLDC peut être rendu plus petit et plus léger qu'un modèle à balais offrant la même puissance de sortie, et ainsi se prêter à des applications où l'espace est limité.

Étant donné l'absence de contact mécanique ou électrique entre le stator et le rotor du moteur BLDC, d'autres procédés sont nécessaires pour indiquer les positions relatives des composants de manière à faciliter la commande de moteur. Pour y parvenir, les moteurs BLDC font appel à l'une des deux méthodes suivantes : utilisation de capteurs à effet Hall ou mesure de la force contre-électromotrice.

Dans de précédents articles, il a été question de la commande basée sur des capteurs à effet Hall (reportez-vous, par exemple, à l'article TechZone traitant de l'« utilisation de la commande en boucle fermée dans les systèmes BLDC »). Le présent article décrit la méthode alternative de la force contre-électromotrice.

Fin des capteurs

Un moteur BLDC fait disparaître les pièces d'usure qui composent le commutateur mécanique d'une unité conventionnelle (amélioration de la fiabilité). En outre, les moteurs BLDC offrent un rapport couple/taille du moteur élevé, une réponse dynamique rapide et un fonctionnement pratiquement silencieux.

Les moteurs BLDC sont classés en tant que dispositifs synchrones, car les champs magnétiques du stator et du rotor tournent à la même fréquence. Le stator est composé de tôles d'acier, munies d'encoches axiales permettant d'accueillir un nombre pair d'enroulements le long de la périphérie interne. Le rotor est constitué d'aimants permanents avec deux à huit paires de pôles N-S.

Le commutateur électronique du moteur BLDC alimente séquentiellement les bobines du stator, générant ainsi un champ électrique tournant qui « entraîne » le rotor avec lui. Pour garantir un fonctionnement efficace, il faut veiller à ce que les bobines soient alimentées exactement au bon moment.

Les capteurs fonctionnent bien, mais représentent un coût additionnel, augmentent la complexité (en raison du câblage supplémentaire) et diminuent la fiabilité (en partie à cause des connecteurs des capteurs qui sont sujets à une contamination par la saleté ou l'humidité). La commande sans capteur remédie à ces inconvénients.

Tirer parti de la force contre-électromotrice

Les enroulements d'un moteur électrique jouent le rôle d'un générateur, dans la mesure où ils traversent les lignes de champ magnétique. Le potentiel généré dans les enroulements est mesuré en volts et désigné sous le nom de force électromotrice (FEM). Selon la loi de Lenz, cette force électromotrice donne lieu à un champ magnétique secondaire qui s'oppose à la variation initiale du flux magnétique entraînant la rotation du moteur. Plus simplement, la force électromotrice résiste au mouvement naturel du moteur et est considérée comme une force contre-électromotrice. Pour un moteur donné avec un flux magnétique et un nombre d'enroulements fixes, l'amplitude de la force électromotrice est proportionnelle à la vitesse angulaire du rotor.

Les fabricants de moteurs BLDC spécifient un paramètre connu comme constante de force contre-électromotrice qui peut être utilisé pour estimer la force contre-électromotrice à une vitesse donnée. Le potentiel aux bornes d'un enroulement peut être calculé en soustrayant la valeur de la force contre-électromotrice de la tension d'alimentation. Quand les moteurs fonctionnent à vitesse nominale, la différence de potentiel entre la force contre-électromotrice et la tension d'alimentation permet au moteur d'absorber le courant nominal et de fournir le couple nominal.

L'entraînement du moteur au-delà de la vitesse nominale augmente sensiblement la force contre-électromotrice, ce qui diminue la différence de potentiel aux bornes des enroulements, et de fait, réduit le courant et le couple. Pousser le moteur encore plus rapidement aurait pour effet de mettre la force contre-électromotrice (plus les pertes du moteur) à un niveau exactement égal à la tension d'alimentation, auquel cas le courant et le couple atteindraient tous les deux la valeur zéro.

Le fait que la force contre-électromotrice diminue le couple du moteur est parfois considéré comme un inconvénient, mais dans le cas des moteurs BLDC, les ingénieurs ont tiré profit de ce phénomène.

Chaque étape de la séquence de commutation d'un moteur BLDC triphasé implique l'alimentation de l'un des enroulements avec une tension positive, celle d'un deuxième avec une tension négative, le troisième étant laissé ouvert. La Figure 1 montre un schéma simplifié de la première des six étapes de la séquence de commutation d'un tel moteur.

Cycle électrique en six étapes de Microchip pour un moteur BLDC

Figure 1 : La première des six étapes d'un cycle électrique pour un moteur BLDC. La bobine A est sous tension positive, la B est ouverte, la C est sous tension négative (informations fournies par Microchip).

Un moteur BLDC utilisant des capteurs à effet Hall utilise la sortie des dispositifs, commandée par un microcontrôleur et fonctionnant au moyen d'un circuit d'attaque, pour commuter des transistors bipolaires à grille isolée (IGBT) ou des transistors à effet de champ métal-oxyde-semi-conducteur (MOSFET) afin d'alimenter correctement et séquentiellement les bobines. Les transistors sont déclenchés (et les bobines alimentées) lorsque la sortie du capteur à effet Hall change d'état.¹

Avec la variante sans capteur du moteur BLDC, il n'y a pas de capteurs à effet Hall. Au lieu de cela, lorsque le moteur tourne, la force contre-électromotrice dans les trois bobines varie selon une forme d'onde trapézoïdale (lignes en pointillés longs), représentée à la Figure 2. À titre de comparaison, la même illustration montre également les sorties des capteurs à effet Hall d'un moteur de configuration similaire.

Sortie du capteur à effet Hall de Microchip comparée à la force contre-électromotrice

Figure 2 : Sortie du capteur à effet Hall comparée à la force contre-électromotrice pour un moteur BLDC triphasé. Notez comment la commutation de la sortie du capteur à effet Hall coïncide avec le passage à zéro de la force contre-électromotrice de la bobine correspondante dans un moteur sans capteur (informations fournies par Microchip).

Une combinaison de ces trois points de passage à zéro pour les bobines permet de déterminer la séquence d'alimentation de la bobine. Notez qu'il existe une différence de phase entre la variation de sortie d'un capteur à effet Hall individuel dans un moteur BLDC classique et le point de passage à zéro de la force contre-électromotrice pour une bobine individuelle dans une unité sans capteur de 30 degrés. Par conséquent, dans un circuit de commande de moteur sans capteur, une fois que le point de passage à zéro a été détecté, un retard de phase de 30 degrés est intégré dans le micrologiciel avant l'activation de l'action suivante de la séquence d'alimentation. Dans la Figure 2, les lignes en pointillés courts indiquent le courant dans les bobines.

La Figure 3 montre un circuit de commande pour un moteur BLDC triphasé sans capteur. Dans ce cas, le circuit utilise un microcontrôleur Microchip PIC18FXX31 8 bits pour générer les sorties PWM (modulation de largeur d'impulsion) et déclencher les transistors MOSFET ou IGBT dans le pont inverseur triphasé. Le microcontrôleur réagit à l'entrée d'un circuit de détection de passage à zéro de la force contre-électromotrice.

Circuit de commande de Microchip

Figure 3 : Circuit de commande pour moteur BLDC triphasé sans capteur (informations fournies par Microchip).

Méthodes de détection de la force contre-électromotrice

Il existe plusieurs techniques pour mesurer la force contre-électromotrice. La plus simple consiste à comparer la force contre-électromotrice à la moitié de la tension du bus CC à l'aide d'un comparateur. La Figure 4a représente une vue schématique d'un tel système. Dans ce cas, le comparateur est relié à la bobine B ; dans un système complet, un comparateur serait connecté à chaque bobine. Dans l'illustration, la bobine A présente une tension positive, la bobine C une tension négative, tandis que la bobine B est ouverte. La force contre-électromotrice monte et descend à mesure que la séquence d'alimentation de cette phase est mise en œuvre.

Le principal inconvénient de ce procédé à comparateur simple est que les trois enroulements peuvent ne pas avoir des caractéristiques identiques, ce qui se traduit par un décalage de phase positif ou négatif par rapport au véritable point de passage à zéro. Le moteur continue probablement à tourner, mais risque d'absorber trop de courant.

La solution consiste à générer un point neutre virtuel, comme indiqué à la Figure 4b, à l'aide de trois réseaux de résistances connectés en parallèle aux enroulements du moteur. La force contre-électromotrice est alors comparée au point neutre virtuel.

Une troisième méthode consiste à utiliser des convertisseurs analogique-numérique (CAN) (Figure 4c). Beaucoup de microcontrôleurs disponibles pour la commande de moteur BLDC incluent des CAN haute vitesse adaptés à cette tâche. Avec cette méthode, la force contre-électromotrice est atténuée de manière à pouvoir être alimentée directement au microcontrôleur. Le signal est échantillonné par le CAN, puis comparé à une valeur numérique correspondant au point zéro. Lorsque les deux valeurs correspondent, la séquence d'alimentation de la bobine est indexée à l'étape suivante. Cette technique présente certains avantages, comme le fait de pouvoir utiliser des filtres numériques pour éliminer les composants de commutation haute fréquence du signal de force contre-électromotrice.²

Circuit de comparateur simple de Microchip

Figure 4a : Circuit de comparateur simple pour la mesure de la force contre-électromotrice (informations fournies par Microchip).

Point neutre virtuel de Microchip

Figure 4b : Le circuit de comparateur simple peut être amélioré par la mise en œuvre d'un point neutre virtuel (informations fournies par Microchip).

Le signal Microchip est échantillonné par un convertisseur analogique-numérique

Figure 4c : Le signal est échantillonné par un convertisseur analogique-numérique, puis comparé à une valeur numérique correspondant au point zéro (informations fournies par Microchip).

La commande de moteur BLDC sans capteur présente un inconvénient majeur : quand le moteur est à l'arrêt, aucune force contre-électromotrice n'est générée, ce qui prive le microcontrôleur d'informations sur la position du stator et du rotor.

La solution consiste à démarrer le moteur dans une configuration en boucle ouverte en alimentant les bobines selon une séquence prédéterminée. Même si le moteur a peu de chance de fonctionner efficacement, il commence à tourner. En fin de compte, la vitesse sera suffisante pour générer une force contre-électromotrice pour que le système de commande passe en mode de fonctionnement normal (et efficace) en boucle fermée.

Comme la force contre-électromotrice est proportionnelle à la vitesse de rotation, les moteurs BLDC sans capteurs peuvent ne pas convenir aux applications qui nécessitent des vitesses très faibles. Dans ce cas, les moteurs BLDC avec capteurs à effet Hall peuvent s'avérer un meilleur choix.

Systèmes de commande de moteur BLDC sans capteur

La popularité grandissante des moteurs BLDC sans capteurs a servi de catalyseur aux fournisseurs de semi-conducteurs pour développer des puces spécialement conçues pour la tâche de commande et d'entraînement de ces unités. Le système de commande du moteur comprend généralement un microcontrôleur associé à un circuit d'attaque IGBT ou MOSFET.

De nombreux microcontrôleurs sont disponibles pour la commande de moteur BLDC sans capteur, depuis les appareils 8 bits simples et économiques aux dispositifs 16 et 32 bits plus performants, tous offrant les périphériques minimum requis pour entraîner le moteur. Ces périphériques incluent des CAN, des comparateurs et des PWM triphasés, pour la protection contre les surintensités.³

Zilog propose sa gamme Z16FMC de microcontrôleurs 16 bits pour la commande de moteur BLDC sans capteur. La société affirme que cette tâche nécessite un microcontrôleur permettant une réponse rapide aux demandes d'interruption pour pouvoir gérer les mises à jour PWM en temps réel. Le Z16FMC assure l'interopération automatisée entre le convertisseur analogique-numérique et le temporisateur, et entre les sorties du comparateur et PWM. La Figure 5 montre un schéma fonctionnel du microcontrôleur de commande moteur Zilog.

Microcontrôleur de commande moteur Z16FMC de Zilog

Figure 5 : Schéma fonctionnel du microcontrôleur de commande de moteur Z16FMC de Zilog.

Le modèle PIC18F2431 de Microchip fait également partie des microcontrôleurs les plus populaires pour la commande de moteur BLDC sans capteur. La puce utilise un processeur 8 bits et peut fonctionner à des vitesses atteignant 16 MIPS. Certaines variantes de la gamme PIC18F intègrent un périphérique PWM de commande de moteur triphasé avec jusqu'à huit sorties et un CAN 10 ou 12 bits.

De son côté, Texas Instruments (TI) propose un kit d'évaluation de commande de moteur pour moteurs BLDC triphasés. Selon la société, le DRV8312-C2-KIT (Figure 6), basé sur le variateur moteur PWM DRV8312, est une plateforme de commutation trapézoïdale avec ou sans capteurs et de contrôle à champ orienté (FOC) sans capteur qui accélère le développement en vue d'une commercialisation plus rapide. Parmi les applications possibles, citons les moteurs sans balais en dessous de 50 V et 7 A pour l'entraînement de pompes médicales, de portes, d'ascenseurs et de petites pompes, ainsi que la robotique et l'automatisation industrielles et grand public.

Kit d'évaluation des moteurs BLDC triphasés de TI

Figure 6 : Le kit d'évaluation des moteurs BLDC triphasés de TI est basé sur le variateur moteur PWM DRV8312.

Une multitude d'applications

Les moteurs BLDC sans capteur sont plus simples et potentiellement plus fiables que les unités qui utilisent des capteurs à effet Hall, en particulier si l'application se situe dans un environnement exposé à la saleté et à l'humidité. Les moteurs se basent sur la mesure de la force contre-électromotrice pour déterminer les positions relatives du stator et du rotor de sorte que la séquence d'alimentation correcte de la bobine puisse être mise en œuvre.

L'inconvénient est qu'aucune force contre-électromotrice n'est générée quand le moteur est à l'arrêt ; le démarrage est donc affecté par un fonctionnement en boucle ouverte. Par conséquent, il faut parfois un peu de temps pour que le moteur se règle et fonctionne efficacement. Autre inconvénient, à basse vitesse, la force contre-électromotrice est faible et difficile à mesurer, ce qui peut se entraîner un fonctionnement inefficace. Il convient d'envisager l'utilisation de moteurs BLDC équipés de capteurs dans de telles applications.

Cependant, pour une multitude d'autres applications, les ingénieurs peuvent tirer profit de moteurs BLDC sans capteurs compacts et puissants. L'utilisation de microcontrôleurs et de circuits d'attaque IGBT ou MOSFET conçus spécialement pour cette tâche peut faciliter le processus de conception. Le développement peut être davantage rationalisé en tirant parti des kits d'évaluation des principaux fournisseurs qui proposent des circuits de référence pour les solutions de moteur BLDC sans capteurs éprouvées.

Références :
  1. « Brushless DC (BLDC) Motor Fundamentals », Padmaraja Yedamale, note d'application de Microchip Technology AN885, 2003.
  2. « Using the PIC18F2431 for Sensorless BLDC Motor Control », Padmaraja Yedamale, note d'application de Microchip Technology AN970, 2005.
  3. « The Need for Autonomous Peripheral Interoperation in Sensorless BLDC Applications », Dave Coulson, livre blanc de Zilog WP002003-0111, 2011

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À propos de l'auteur

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Steven Keeping

Steven Keeping is a contributing author at DigiKey. He obtained an HNC in Applied Physics from Bournemouth University, U.K., and a BEng (Hons.) from Brighton University, U.K., before embarking on a seven-year career as an electronics manufacturing engineer with Eurotherm and BOC. For the last two decades, Steven has worked as a technology journalist, editor and publisher. He moved to Sydney in 2001 so he could road- and mountain-bike all year round, and work as editor of Australian Electronics Engineering. Steven became a freelance journalist in 2006 and his specialities include RF, LEDs and power management.

À propos de l'éditeur

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